"Nous sommes en guerre ?" (CJ7)


"Mère nature" n'est pas en colère ! Confinement J7 / Par Vincent Prud'homme

« Mère nature » a décidé de mettre un coup d’arrêt à nos activités ...
« Mère nature » est en colère contre nous ... 
« Mère nature » nous fait payer notre insouciance ... 
Remplacez « Mère nature » par Dieu et vous avez le cocktail détonnant d'un démiurge tout puissant en colère s’abattant sur l’humanité comme jamais ! A en croire les vidéos, films et autres clips sur le sujet qui nous inondent, le jugement dernier ... nous y sommes ! 

Afin de voir les évènements sous un angle différent prenons le temps de retourner le projecteur.
Ça n’est pas notre planète Terre qui est en train d'agoniser ! C’est l’humanité qui se meurt à grand pas ! La terre n'est pas le bateau qui coule, notre maison ne brûle pas et ça n’est pas la peine de trouver des excuses bidons chez les dieux ou chez les Grecques. Mère nature s’en fout autant le dire clairement. Mère nature à tout le temps de digérer nos bouteilles plastiques, de recréer du pétrole, de transformer nos pneus, d’ingurgiter notre carbone et nos centrales nucléaires, elle a encore 3,5 milliards d’années devant elle avant de rendre l’âme. Elle a même le temps encore de refaire tout un cycle depuis la grande soupe originelle, depuis l’apparition des premiers organismes monocellulaires jusqu’à Homo sapiens et plus encore ... Ça n’est donc pas notre « Mère nature » qui est responsable de ce qui arrive car elle s’en fout royalement. L’ours blanc et la banquise peuvent bien disparaître, elle s’en contre fiche ! Les nappes phréatiques peuvent bien s’assécher, elle continue de tourner ! Dire que Mère nature est en péril et croire que nous petits comme nous sommes nous allons pouvoir sauver la terre pose l’homme encore une fois au centre de l’univers et affirme sa toute-puissance non plus comme sauveur de l’Humanité mais comme sauveur de la Terre ! L’homme ne sauvera pas la Terre, elle n’a pas besoin de nous pour se reconstruire. Commençons par nous sauver nous-mêmes au lieu de vouloir sauver la terre, et la terre suivra. Non « Mère nature » n’est pas en colère. Elle vit simplement l’impermanence des choses et des états.

Mais alors comment nous sauver nous-mêmes ? 
Et si nous faisions la tentative de voir que nous sommes en colère contre nous-mêmes, que nous sommes en guerre contre nous-mêmes ? L’ennemi est invisible parce que l’ennemi c’est nous au niveau mondial. Notre Président l’a dit « nous sommes en guerre », mais l’ennemi n’a pas été désigné car l’ennemi est partout et nulle part à la fois. Il est intolérable de le désigner, et nous ne voulons pas le voir car nous devrions admettre qu’il est en nous et en nous tous. Chacun est devenu le suspect ou le milicien d’un autre, qui n’est en définitive que le reflet de nous-mêmes par effet miroir. Nous sommes devenus toxique à nous-mêmes. Il serait juste de le reconnaître. L’ennemi n’est pas ailleurs que là, à cet endroit précis.

Pas la peine non plus de resservir pour la centième fois la liste des choses que nous n’avons pas bien faites, on la connaît par cœur. Ce qui est fait est fait et si cela a été fait de cette façon c’est que c’était la meilleure chose que nous pouvions faire. À quoi bon culpabiliser. Nous sommes là aujourd’hui au meilleur endroit que nous puissions être. Même si pour certain c’est extrêmement difficile à entendre. Les erreurs nourrissent les succès et les succès les erreurs. Nous sommes en mouvement. Nous sommes constamment dans ce jeu d’équilibre subtil entre réussites et échecs, entre positif et négatif.
Les détracteurs des résonnements culpabilisant vont pouvoir se gloser d’avoir eu raison. Il n’empêche que je n’entends dans ces discours uniquement ce que l’humanité à fait de pire durant ces 50 dernières années ! Alors oui, il y a du «pire», mais n’oublions pas qu’il a aussi du «meilleur». Il serait bon de le reconnaître et de ne pas oublier les choses magnifiques, extraordinaires qui ont été produites tout au long de ces décennies. 

Aujourd’hui, après une semaine de confinement et alors que nous vivons une accélération générale du temps et un mouvement global de réchauffement nous avons tendance à ne voir que les côtés négatifs de cette transformation du monde. Mais c’est oublier que nous vivons dans un monde dual, composé de négatif et de positif de façon simultané. C’est oublier qu’au moment où certains profitent de cette crise pour se remplir les poches aux dépens de ceux qui souffrent, d’autres mettent en placent des chaînes de solidarité sans précédent, des levés de fonds exceptionnels et des dons qui afflux de toute part pour aider les plus démunis, ceux qui sauvent des vies et ceux qui souffrent. 

Au plus nous nous enfonçons dans la laideur, la guerre et l’horreur quelque part dans le monde et au plus la lumière et la beauté apparait ailleurs, à la mesure de la violence engendrée pour contre balancer les forces en action. Notre monde produit de la violence c’est certain mais il produit aussi de la beauté, du partage, des comportements altruistes, de l’authenticité et de la sérénité à la mesure de la violence produite, il ne faut pas l’oublier. Au plus notre monde est violent et noir côté face et au plus il produit côté pile l’énergie opposée indispensable à l’équilibre des contraires. 

Nous avons la sensation aujourd’hui d’être en difficulté et de vivre cette période d’accélération en y étant soumis et nous voudrions infléchir la courbe qui à ce jour semble ne pas jouer en notre faveur. Nous essayons de surfer sur cette vague gigantesque qui nous emmène dans une direction dont nous n’avons pas le contrôle, une direction qui nous fait peur et nous pensons que cette direction n’est pas la bonne, nous doutons. Mais qu’en savons-nous ? Où nous emmène cette vague ? Son énergie est générée et gérée par des forces qui nous dépassent. Ce sont des forces et des énergies colossales, cosmiques, terrestres, océaniques ou volcaniques. Ce sont aussi des forces plus subtiles, invisibles comme les fréquences et les vibrations par millions. Nous pensons à notre échelle d’humain pouvoir infléchir ce mouvement, car nous sommes dans la croyance de la toute-puissance de l’homme. L’homme qui détruit, pollue et ensuite l’homme qui sauve et restaure. Celui qui sauve est le même que celui qui détruit. Il est tendu vers le contrôle et le pouvoir sur la vie. En définitive ces énergies ont la même origine, elles sont régies par les mêmes forces, celles du contrôle et de la peur.
Par nature, nous choisissons notre camp. Que ce soit le camp du bien ou le camp du mal, nous avons toujours la sensation d’être du bon côté, d’avoir fait le bon choix. Mais c’est oublier qu’il n’y a pas de bon ni de mauvais choix. Le mal est aussi nécessaire que le bien et le bien est aussi nécessaire que le mal. Alors quoi faire fort de ce raisonnement ? 
Nous pouvons faire le choix du rien, mais nous pouvons aussi faire le choix du tout.

Tout faire, en faire le maximum, le plus possible, casser la baraque, tout faire péter, encore et encore ...
Ou ne rien faire, baisser les bras, se résigner ou s’enfermer, construire des bunkers, des abris, des arches, tout cela est finalement la même énergie. Nous sommes enfermés dans les excès des extrêmes soutenus par la peur. Tout et rien ayant pour base le même type de vibration et la même origine.
 Rappelons-nous que ne sommes pas obligés de sauver la terre, ni de sauver l’humanité et que nous n’avons pas à culpabiliser de ce que la terre est devenue, ni de ce que devient l’humanité naviguant à son bord.

Nous avons encore le choix de nous laisser porter par nos aspirations, par ce qui nous rend vivant. Nous avons le choix de nous laisser traverser par la vie, de nous laisser toucher par la vie et vivre notre vie simplement sans être asservie par l’obligation de sauver le monde. Simplement vivre ! Vivre simplement. Mais vivre pleinement ! Nos deux pieds bien en contact avec le sol, avec la terre ou la boue et notre tête en connexion avec le cosmos, les étoiles et le ciel. Transformer, jouer, créer, rire, pleurer, aimer, manger, boire, dormir sous les étoiles, « ne prendre de soleil juste ce que l’on peut tenir », comme le dit si bien le poème de Cécile Sauvage, qui date de la fin du XIX (et c’est éblouissant à en pleurer) et faire sur cette terre des choses qui nous rendent pleinement vivant ! C’est de cela dont la terre a le plus besoin, car cette énergie fertilise, mais elle ne fertilise pas le sol, elle fertilise notre propre terreau. C’est intéressant d'en prendre la mesure.

En ce moment même alors que la guerre continue de faire rage au moyen orient, que les espèces menacées continues à disparaître par millier, que les industries continuent à cracher leur venin avec une violence et une puissance inouïe jamais égalé dans l’histoire de l’homme, nous avons en contrepartie et de façon simultané une montée en puissance de la conscience et de la créativité. Et cela donne du sens à notre présence, beaucoup de sens. 
L’être humain n’a jamais été aussi créatif, il n’y a jamais eu autant de diversité de types d’expressions. L’être humain invente des machines et des outils fabuleux à la limite de la pure magie, produit des musiques d’une puissance vibratoire ahurissante, réalise des films qui nous touchent au plus profond de nous-mêmes, construit des ouvrages d’arts d’une finesse et d’une élégance inouïe, imagine des projets qui nous laissent sans voix, organise des évènements et adopte des attitudes inspirantes. Nous sommes éblouis tous les jours par le génie, l’ingéniosité, le talent, la volonté de certaines femmes ou de certains hommes. Et cela ne fait que commencer !

Au plus la glace fond aux pôles et au plus la conscience, la créativité se libèrent. Tout ce qui a lieu sur cette terre est généré par notre Mère Gaïa, cette entité vivante, source de toutes les transformations et de toutes créations. Il faut être capable de voir que tout ce qui arrive et qui est généré par cette source est la perfection même. Nous faisons partie d’un jeu qui nous dépasse et nous avons la prétention d’avoir une influence sur le déroulement de cette partie qui se joue ... Alors que nous avons juste à profiter de cette énorme quantité d’énergie libérée pour vibrer en nous mettant au diapason de ses fréquences et profiter de la vie.

Il est évident que nous sortirons grandi de cette crise qui, même si elle nous fait souffrir au plus haut point, même si elle semble totalement injuste, même si elle touche les plus démunis, même si elle va provoquer une crise économique mondiale, même si, même si ... Elle va aussi permettre l’émergence d’un nouvel ordre mondial et une redistribution des cartes, une inversion des énergies.
Alors, chaque jour qui passe j’apprends à tendre l’oreille plus finement, à affûter mes sensations, mon ressenti, je m'initie à baisser le son et à m’éloigner du bruit du monde, je tente de diminuer la lumière des projecteurs et je m'exerce à entendre le souffle du monde qui n’est autre que celui de mon cœur, de mon propre système nerveux, de mon système sanguin, et je découvre que c’est aussi celui du cosmos tout entier. De ce jeu de va-et-vient entre moi et le cosmos surgit le mystère, cette limite entre ce que je sais et ce que je ne serais jamais. Cela s’appelle le sacré. 
Vincent Prud'homme le 23/03/2020

Réponses du 27/03

Bonjour Vincent,
Merci pour ce partage, merci vraiment : il résonne. Il raisonne.
Je pense être dans le même esprit en témoignant de ce monde fou qui s'arrête, presque immobile, et qui nous donne (nous offre?) le temps de regarder le vivant qui continue d'être, tout simplement. Cela remet des perspectives, ouvre des fenêtres, enfonce des portes ouvertes, laisse le je-ne-sais-quoi se faufiler dans les émotions et la lumière du jour, chaque jour différente. Me rapproche de l'essentiel. Ton texte m'apporte cela dit un apaisement : je suis encore dans le combat, la volonté de redresser la barre. Et tu me rappelles que le bateau ira où il doit aller, et que je dois apprécier le "ride", plutôt que de m'épuiser à vouloir le changer. Mais quel équilibre difficile à trouver quand on se questionne toujours sur la "meilleure" place, l'action "juste", la "bonne" réaction ou le comportement "utile" alors que finalement, c'est juste ce qui est. Difficile je trouve de s'en convaincre, alors merci de me le répéter. Ton message m'a fait du bien ce matin. J'entends les oiseaux dehors, et le bruit du vent un peu plus fort.
Math.


Réponses du 27/03

Merci Vincent pour ces considérations dans lesquelles je te reconnais bien.
J'ai comme toi un optimisme fondamental, mais qui ne va pas jusqu'à voir dans nos erreurs les plus dévastatrices les opportunités qu'elles nous offrent. Je t'envie un peu de trouver dans les grands bouleversements que nous subissons la source de notre créativité et de la magie du monde. Comme tu le sais je ne parviens pas à un tel détachement, et me suis toujours perçu comme un vermisseau, non seulement dans mes combats, souvent perdus d'avance, mais plus encore dans cette quête de spiritualité (et là on est prié de ne pas rigoler). Il reste ce texte magnifique qui ouvre sur des réflexions infinies.
Yvon.